INTERVIEWÉ PAR « TALENTS D’AFRIQUE » Moïse KATUMBI : « La Super Ligue, seule solution pour développer le football africain des clubs »
C’est l’un des hommes qui comptent dans le paysage du football africain. Le hasard n’y est pour rien si Moïse KATUMBI, en marge de ses fonctions officielles, est un invité régulier de la FIFA et de son président. D’un continent à l’autre, sans vanité, le chairman distille opinions et conseils, pour mieux alimenter cette passion du foot qui impressionne ceux qui l’approchent. C’est certainement la raison pour laquelle les journalistes de « Talents d’Afrique » lui ont tendu micro et caméras, émission diffusée lundi 14 février sur Canal+. Au menu : le projet de Super Ligue africaine. Nous aussi, nous étions là. Suivez-nous!
- Président, vous vous êtes prononcé en faveur de la Super Ligue Africaine voulue par le président de la FIFA, Gianni INFANTINO. Est-ce la solution pour développer le football des clubs en Afrique ?
MK : C’est même la seule solution pour le développement du football en Afrique. Vous le savez, aujourd’hui le football rime avec business. Si nous arrivons à organiser la Super Ligue, j’espère que beaucoup de choses vont changer dans la vie de nos clubs.
- En quoi la Super Ligue peut aider le TP Mazembe à se développer ?
MK : Il ne faut pas comparer l’Europe à l’Afrique. Le sponsoring des clubs en Europe est évalué à plusieurs milliards de dollars tandis qu’en Afrique on n’atteint même pas 10 millions de dollars. C’est très triste, car nous avons toutes les richesses. Dire qu’il y a même des dirigeants qui combattent le sponsoring des clubs africains!... En Europe, cette manne financière des sponsors contribue au développement du sport et des clubs. Pour le développement du football africain, la Super Ligue est la clef.
- Sur le plan financier et celui de l’attractivité, qu’est-ce que la Super Ligue peut apporter de plus que la Ligue des Champions, laquelle réunit déjà les meilleurs clubs du continent. Avez-vous reçu des garanties à ce sujet ?
MK :Il ne faut jamais avoir peur d’oser, d’avancer. Je vous donne un exemple : vous ne recevez qu’un million et demi de dollars américains en jouant la finale de la C1 alors que le club finaliste aura dépensé plus au moins 15 millions pour atteindre ce stade ultime. C’est une grosse perte pour toutes les équipes africaines. Avec la Super Ligue, les clubs seront des grands bénéficiaires. Je laisse à la CAF le soin d’annoncer ce que vont gagner les clubs. Mais de cette manière le niveau du football africain sera bien plus relevé et nous pourrons enfin prétendre un jour gagner la Coupe du monde.
MK : Pour la RDC par exemple, je me suis battu pour avoir deux clubs en Super Ligue. Les autres clubs qui n’y seront pas se battront pour y accéder et au même moment nos joueurs – hormis les super stars – ne rêveront plus de l’Europe parce qu’ils seront tout aussi bien rémunérés chez nous...
- Pensez-vous que le TPM fait aujourd’hui partie des vingt meilleurs clubs du continent ?
MK : Il ne faut pas voir le TPM à travers nos performances actuelles. Pendant mon exil, je ne cessais de demander aux dirigeants sur place au club de donner la chance aux jeunes de notre académie. Aujourd’hui, même si on ne marque pas beaucoup, il suffit de regarder la qualité de jeu de l’équipe. Nous sommes en train de transformer notre équipe, la jeunesse prend déjà le pouvoir. Les grands clubs comme le Real Madrid, le FC Barcelone, l’Espérance Sportive de Tunis ont eu ce même problème. A un moment, il faut prendre une décision : il vaut mieux reculer un temps pour avoir plus tard une très bonne équipe.
- En parlant de la jeunesse, êtes-vous passé du statut par exemple de Real Madrid capable de faire venir des galactiques à ce celui du Borrusia Dortmund qui mise sur les jeunes ?
MK : Nous aussi nous misons désormais sur les jeunes. Faire venir des joueurs de gauche et de droite a ses limites, souvent ce sont des mercenaires. Au TPM, nous avons donné à de jeunes joueurs venus d’autres clubs la chance de disputer la Ligue des Champions. Inconnus à leur arrivée, ils ont ainsi pu se faire connaître puis certains sont devenus des ennemis du club. Pour moi, nous avons notre académie et des écoles de football que nous allons implanter à travers le pays pour avoir de nouveaux très bons joueurs. Pour le moment, nous avons un peu plus de 2.000 jeunes, c’est une très bonne pépinière. Notre choix, c’est de continuer à faire confiance en la jeunesse.
- Quelle est la politique sportive du TPM, est-ce former, faire progresser et vendre ? Comme par exemple MULEKA et TSHIBANGU ?
MK : Notre problème n’est pas de former pour vendre. Notre mission est de former ces jeunes afin qu’ils restent au pays. C’est à ce moment-là que la Super Ligue devient importante. Isaac TSHIBANGU m’a appelé récemment en disant qu’il veut revenir. Il n’est pas le seul, il y a des joueurs (nombreux) qui sont partis et demandent à revenir parce qu’ils constatent s’être trompés en croyant trouver mieux ailleurs…
- Doit-on oublier le TPM des années 2010 et suivantes qui recrutait les meilleurs du continent comme SINGULUMA, SAMATTA, ASSALE, etc. ?
MK : Faisons la part de choses. A l’époque, lorsqu’on recrutait, notre académie venait à peine d’ouvrir. Mais même aujourd’hui, nous n’allons pas nous empêcher de recruter. Nous avons des joueurs qui viennent d’ailleurs, du Mali et de la Côte d’Ivoire par exemple.
MK : Mais progressivement, les progrès de notre formation nous font constater que les joueurs issus de nos rangs sont meilleurs que les autres. Alors, une conclusion s’impose : nous devons faire confiance aux joueurs congolais.
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